Les malheurs de Sophie - Comtesse de Ségur
Extraits – Chapitres I, II, III
Pour Pol…
« La poupée de cire », « L’enterrement » et « La chaux » sont des chapitres des "Malheurs de Sophie".
Le roman « Les malheurs de Sophie » fut publié en 1858.
La Comtesse de Ségur commença sa féconde carrière d’autrice pour enfants à l’âge de 55 ans. Souvent décriée, du moins à l’époque contemporaine, pour les traitements parfois durs réservés aux petits héros de ces romans, il est bon de rappeler que la Comtesse de Ségur ne cesse, dans ses ouvrages, de condamner les violences éducatives (ce qui, dans le contexte de son époque, est en soi novateur).
Dans « Les malheurs de Sophie », Sophie, petit double de l'écrivaine, est une petite fille, frondeuse et quelque peu délaissée par les adultes qui l'entourent.
« La poupée vécut très longtemps bien soignée, bien aimée ; mais petit à petit elle perdit ses charmes, voici comment.
Un jour, Sophie pensa qu’il était bon de laver les poupées, puisqu’on lavait les enfants ; elle prit de l’eau, une éponge, du savon, et se mit à débarbouiller sa poupée ; elle la débarbouilla si bien, qu’elle lui enleva toutes ses couleurs : les joues et les lèvres devinrent pâles comme si elle était malade, et restèrent toujours sans couleur. Sophie pleura, mais la poupée resta pâle.
Un autre jour, Sophie pensa qu’il fallait lui friser les cheveux ; elle lui mit donc des papillotes : elle les passa au fer chaud, pour que les cheveux fussent mieux frisés. Quand elle lui ôta ses papillotes, les cheveux restèrent dedans ; le fer était trop chaud, Sophie avait brûlé les cheveux de sa poupée, qui était chauve. Sophie pleura, mais la poupée resta chauve.
Un autre jour encore, Sophie, qui s’occupait beaucoup de l’éducation de sa poupée, voulut lui apprendre à faire des tours de force. Elle la suspendit par les bras à une ficelle ; la poupée, qui ne tenait pas bien, tomba et se cassa un bras. La maman essaya de la raccommoder ; mais, comme il manquait des morceaux, il fallut chauffer beaucoup la cire, et le bras resta plus court que l’autre. Sophie pleura, mais le bras resta plus court. »